Presque médiévale : la tarte à la raisinée de Suisse romande

Il n’y a ni raisin, ni vin dans cette tarte.

Ni chocolat.

Ni café.

Ni caramel.

Mais de la raisinée, ou vin cuit, ou cougnarde ou Biresaassa.

Une spécialité de Suisse romande.

Comment ai-je découvert cela ? Par hasard, bien sûr. Lors d’un déjeuner, une collègue me décrit (en italien) une tarte au “mosto di vino” ou “mosto di frutta” qu’elle aurait goûté et trouvée délicieuse, et dont elle cherche la recette. Mais je n’ai pas la moindre idée de ce que peut être cette tarte, ni d’où elle vient, et encore moins de recette.

Je fouille internet et tombe sur une spécialité suisse qui pourrait peut-être correspondre à cette fameuse tarte : la tarte à la raisinée ou tarte au vin cuit. Fabriquée comme son nom l’indique à partir de raisinée ou vin cuit, c’est à dire une réduction de jus de poires et /ou de pommes, de couleur brune presque noire. Bon, après discussion avec la collègue, il n’est pas certain que ce soit vraiment ce qu’elle cherchait. Le mystère de la tarte “al mosto di vino” reste donc entier. En attendant, j’ai découvert un dessert suisse pluriséculaire, dont le nom sonne presque médiéval, et je veux tester cela.

J’essaie donc de me procurer de la raisinée. Mais ne trouve rien dans les supermarchés bâlois. Même chez Globus, l’épicerie de luxe du centre-ville. Je finis par trouver un producteur romand qui vend en ligne : le Moulin Huilerie de Severy. Je commande deux bouteilles.

Raisinée de poireRaisinée

Celle de poires est très épaisse. Celle de pomme est plus fluide et plus acidulée.  A première vue, cela fait penser au Zuckerrübensirup ou au sirop de Liège. Mais c’est sans doute, au point de vue goût, plus proche de ce dernier, avec cette saveur de caramel brûlé que prend n’importe quel fruit outrageusement surcuit. Bon, tel quel, c’est vraiment rude… Mais en tarte, c’est délicieux.

Une pâte sucrée, un appareil composé de crème, d’œufs, et de raisinée, et le tour est joué. Il y a de nombreuses recettes sur internet. J’en ai, bien sur, fabriqué une à ma façon.

Un peu de poudre de nillon de noix et de noisettes dans la pâte sucrée, pour donner du goût et un côté un peu rustique. Le nillon ou nion est le résidu du pressage de l’huile de noix ou de noisette. En français de France, on dirait tourteau de noix ou noisette. Pratiquement dépourvue de gras, cette poudre donne un goût délicieux sans alourdir la pâte ni la rendre trop friable.

Pour l’appareil, l’idéal est de prendre de la crème double (à 46% de m.g.), qui donne un fondant crémeux incomparable, à défaut, de la crème entière à 35%. Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, la raisinée n’a pas un goût très sucré, le résultat n’a donc rien d’écoeurant, bien au contraire.

Tarte à la raisinée

Pour un cercle ou moule à tarte de 24 cm de diamètre

Pâte sucrée

  • 200g de farine
  • 100g de beurre
  • 3g de sel fin
  • 15g de nillon de noix ou noisettes (ici un mélange à parts égales)
  • 1 petit œuf (moins de 60g)
  • 60g de sucre blanc

Appareil à flan

  • 3 œufs
  • 2 jaune d’œufs
  • 200g de crème double
  • 150g de raisinée de poires

1. La pâte : mélanger le beurre mou et le sucre, ajouter l’œuf battu, le nillon de noix / noisettes, puis la farine, mélanger et former une boule, puis aplatir, filmer au contact et mettre au frais 30 minutes.

2. Etaler la pâte sur une feuille de papier cuisson et la poser avec sa feuille dans un cercle ou un moule à tarte. Façonner les bords en pinçant la pâte entre le pouce et l’index. Piquer le fond et les bords avec une fourchette. Remettre au frais 30 minutes pour raffermir et éviter tout affaissement lors de la cuisson.

3. Préchauffer le four à 180°C. Poser un papier cuisson ainsi que des haricots ou des billes en céramique sur la pâte pour éviter qu’elle ne gonfle. Enfourner 20 minutes : la pâte doit à peine blondir.

4. Pendant ce temps, préparer l’appareil en mélangeant les œufs et les jaunes, la crème double, la raisinée.

5. Sortir la pâte du four, retirer les poids et le papier sulfurisé. Baisser le thermostat à 150°C.

6. Verser l’appareil sur la pâte et faire cuire environ 30 à 40 minutes. L’appareil doit être pris mais pas trop ferme et doit dégager une odeur un peu caramélisée. Il paraîtra sans doute encore liquide au sortir du four, mais il ne faut pas prolonger la cuisson, car il se raffermit beaucoup en tiédissant.

9 commentaires

    1. Oui, j'ai pensé que cela pouvait être cela aussi… mais je n'ai rien trouvé qui ressemble à une tarte fine, comme me la décrivait ma collègue italienne, qui du reste, ne semblait pas du tout faire référence à un dessert italien. Elle avait l'air de croire que c'était français… Bref… Il faut que j'en reparle avec elle…

  1. Hééé !!! quel plaisir cette visite, d'autant que ce n'est pas les mains vides avec cette recette si originale !!!
    A très vite ! Bonne fin de journée

  2. oooh!! chère Natalia, je suis vraiment heureuse de ce retour!!
    pour ma part je ne fréquent pratiquement plus mon blog, ayant une page FB . Mais ce retour gourmand me réjouit!! J'espère que tu fais toujours beaucoup de musique.et mini Criskou???

    1. Chère Agnès, ma foi, je ne sais pas si c'est un retour, mais merci pour ta fidélissime fidélité ! Je fais toujours de la musique (musicologie) et mini K. va bien, fait de la musique, apprend l'allemand à l'école suisse, etc. Il faut que j'aille plus souvent sur ta page FB…

  3. Merci Natalia pour cette recette bien suisse, que je n'ai jamais faite ! (j'habite Genève). Contente aussi de retrouver le mot "nillon" que j'avais oublié !!
    Bonnes études et cuisine !

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